Femme indigène marchant sur une route couverte de pétrole Amazonie équatorienne
Union de afectadas y afectados por Texaco (hoy Chevron)
Femme indigène sur une route pleine de pétrole jeté par une entreprise pour lutter contre la poussière...

 

APPEL A LA BANQUE NATIONALE SUISSE CONCERNANT SES VOTES EN MATIERE DE RESPECT DE L'ENVIRONNEMENT ET DES DROITS HUMAINS LORS DE L'ASSEMBLÉE GENERALE DE CHEVRON LE 31 MAI 2017

 

Nous, organisations et institutions de la société civile, appelons la Banque nationale suisse (BNS) à intervenir au moyen de ses droits de vote à l'Assemblée annuelle de Chevron du 31 mai 2017 aux États-Unis pour soutenir les propositions des actionnaires dans le sens de la limitation du réchauffement climatique et du respect des droits humains et environnementaux.

 Un rapport des « Artisans de la Transition »1 a récemment relevé l'importance des investissements dans l'industrie fossile dans le portefeuille d'actions d'entreprises étatsuniennes de la BNS, cotées en bourse aux États-Unis. Or, cet investissement n'est pas compatible avec ses directives de placement en matière de respect des droits environnementaux et humains2 et l'Accord de Paris sur le climat signé par la Suisse. Dans ce portefeuille, Chevron occupe une place importante.

En Suisse, la multinationale Chevron est bien connue pour ses violations des droits humains et environnementaux concernant les opérations pétrolières de Texaco (rachetée par Chevron) en Amazonie équatorienne, l'une des contaminations les plus importantes du monde. Après 50 ans de pollution et 23 ans de procès, malgré une sentence de 9,5 milliards de dollars US pour réparer les dommages affectant les moyens de subsistance et la santé des habitants, l'UDAPT - Union des victimes des opérations pétrolières de Texaco (devenue Chevron), représentant 30 000 paysans et indigènes, mène encore des procès dans plusieurs pays pour faire exécuter la sentence. En attendant, les toxiques continuent à se répandre poursuivant la destruction des écosystèmes de la forêt amazonienne dont l'importance pour le maintien du climat n'est plus à démontrer.

En marge du Forum économique mondial (WEF) de Davos, Chevron a obtenu à deux reprises (en 2006 et en 2015) le « Public Eye Award » décerné par la Déclaration de Berne (aujourd’hui Public Eye) et Greenpeace. Ce prix de la honte, distingue Chevron comme l'entreprise la plus irresponsable du monde en matière de droits environnementaux et humains3. A Genève, le cas est régulièrement évoqué comme exemple emblématique au sein du groupe de travail intergouvernemental sur les multinationales et les droits humains du Conseil des droits de l'homme de l'ONU de même que dans la campagne internationale contre l'impunité des multinationales regroupant plus de 200 organisations de la société civile4. En 2016, à l'occasion de la journée mondiale anti-Chevron, plusieurs organisations ont établi une carte mondiale des conflits de Chevron5.

Dans ses propositions présentées à l'Assemblée Générale de la BNS le 28 avril 2017, le collectif d'actionnaires AAA+ demande que la BNS respecte des critères éthiques au niveau de ses placements, notamment relatifs aux droits humains et environnementaux6. Concernant le réchauffement climatique, sur l'initiative de l'Alliance climatique, 135 personnalités suisses ont adressé un appel à la direction de la BNS. Elles lui demandent de déterminer et de publier le niveau d'émissions de CO2 imputable à portefeuille et de développer un scénario de sortie aboutissant à l'exclusion des investissements dans les entreprises disposant des plus grandes réserves d’énergie fossile, y inclus Chevron7. Or, pour arriver à ces objectifs, les informations concernant les activités et stratégies des multinationales font cruellement défaut.

Depuis plusieurs années, des groupes d'actionnaires de Chevron demandent une meilleure transparence concernant les décisions de Chevron. Or, dans ses recommandations de vote pour l'assemblée du 31 mai 2017, la direction s'oppose à plusieurs propositions visant à mieux évaluer les décisions et stratégies de l'entreprise, notamment concernant des questions d'environnement, de climat et de gouvernance.

Au vu de ce qui précède, nous demandons à la BNS ou ses mandataires lors de l'Assemblée annuelle de Chevron le 31 mai 2017 aux États-Unis, de voter en faveur ses propositions suivantes8:

Proposition 8 : Stockholder Proposal Regarding Report on Transition to a Low Carbon Economy : Cette proposition demande à Chevron de fournir un rapport annuel évaluant comment l'entreprise peut répondre au changement climatique et à la transition à une économie à faible émission de CO2 face aux risques financiers susceptibles de mettre en danger a rentabilité future. La proposition fait notamment référence à l'étude récente (2016) « Unconventional Risks : the Growing Incertainty Of Oil Investments » (Risques non-conventionnels : l'incertitude croissante concernant les investissements dans l'industrie pétrolière) de «As You Sow».

Proposition 9 : Stockholder Proposal Regarding Independent Chairman : Cette proposition qui demande que le président du Conseil de direction soit un membre indépendant, fait notamment référence au cas de Chevron en Amazonie qui, selon les initiants de cette proposition, a été mal géré. Des actionnaires ont demandé à plusieurs reprises des enquêtes pour savoir, si les informations données par la direction à ses actionnaires ont été correctes et complètes concernant ce cas.

Proposition 10 : Stockholder Proposal Regarding Independent Director with Environmental Expertise : Cette proposition demande de nommer au sein de la direction de Chevron, un directeur indépendant avec une expertise en environnement permettant de mieux intégrer les enjeux environnementaux dans les stratégies de l'entreprise.

Proposition 11 : Stockholder Proposal Regarding Special Meetings: Cette proposition demande d'ouvrir la possibilité à 10% des détenteurs d'actions de demander la convocation d'une AG extraordinaire pour obtenir des informations détaillées concernant des sujets spécifiques tel que le litige relatif à la réparation des dommages causés en Amazonie équatorienne. Les initiants de cette proposition estiment que ce cas a été mal géré. En lieu et place d'essayer d'aboutir à un règlement rapide, équitable et complet pour les victimes, la direction de Chevron a persisté dans un procès interminable qui a entraîné des coûts énormes.

signatures

Signatures (au 24 mai 2017) :
Alliance climatique Suisse, AAA+ (Assemblée des actionnaires actifs positifs), Amnesty International-Suisse, ASK (Groupe de travail Suisse-Colombie), Attac - Suisse, CADTM, CSSR (Centrale sanitaire suisse romande), CETIM (Centre Europe-Tiers-monde), Fossil Free Suisse, Grands-parents pour le climat - Suisse, Greenpeace - Suisse, Comundo, Marche mondiale des femmes-Suisse, Medicus Mundi - Suisse, Multiwatch, SPM (Société pour les peuples menacés) - Suisse, Solifonds, Stop TiSA - Suisse, Uniterre.


1 - Les investissements de la BNS dans l’industrie fossile aux Etats-Unis : une catastrophe financière et pour le climat, Artisans de la Transition, 2016 : http://www.artisansdelatransition.org/rapports/banque-nationale-suisse-carbone.pdf

2 - Directives de la Banque nationale suisse (BNS) sur la politique de placement (2015), point 3.2 : https://www.snb.ch/fr/mmr/reference/snb_legal_richtlinien/source/snb_legal_richtlinien.fr.pdf

3 - Public eye awards, voir: http://publiceyeawards.ch/fr/case/chevron/

4 - Bulletin du CETIM n° 51, 2015, p. 7 : http://www.cetim.ch/wp-content/uploads/Bulletin51VFRweb.pdf

5 - Lutte mondiale contre Chevron, CETIM, 2016, voir: http://www.cetim.ch/lutte-mondiale-contre-chevron/

6 - Propositions du collectif AAA+, voir : http://aaapositifs.ch/pour-une-gestion-ethique-des-actifs-de-la-bns-3a2017-02/

7 - Lettre ouverte pour la protection du climat : http://www.alliance-climatique.ch/blog/lettre-ouverte-pour-la-protection-du-climat-rencontre-avec-la-b

8 - 2017 Proxy statement; Notice of 2017 Annual Meeting of Shareholders to be held on May 31, Chevron, 2017, p. 70-77:
https://www.chevron.com/-/media/chevron/shared/documents/chevron-proxy-statement-2017.pdf